Editorial: La Suisse échappe aux crocs américains

 

Pierre-Yves Frei | 20.08.2009 | 00:00

 

Rares sont les accords qui voient la victoire des deux parties. Celui passé entre les Etats-Unis et la Suisse à propos d’UBS n’appartient clairement pas à cette catégorie.

 

Même si le Conseil fédéral se félicite d’avoir arraché l’essentiel dans ces négociations – et c’est sans doute vraiil s’agit de garder à l’esprit qu’en temps normal, la Suisse aurait soit rejeté la demande d’entraide administrative des Etats-Unis, soit l’aurait traitée avec une circonspection qui n’aurait eu d’égale que la lente, très lente minutie exigée par de telles affaires.

 

Alors certes, les procédures prévues par le droit suisse et la convention de double imposition seront respectées. Mais on ne peut pas se contenter de ce seul point.

 

Derrière la victoire pour le respect de la procédure juridique, il y a tout de même la défaite d’un symbole. Jamais, auparavant, une banque helvétique n’avait été contrainte, par le droit ou les pressions politiques, à mettre sur le billot la tête de milliers de ses clients.

 

Les milieux bancaires helvétiques se sont toujours battus bec et ongles pour renforcer le secret bancaire au point que celui-ci apparut un temps comme une forteresse inexpugnable.

 

Mais, depuis les années70, on assiste à une longue et inexorable érosion. Comment le nier? Et comment croire que cette tendance au délitement ne se poursuivra pas quand on constate, dans la même année, qu’une grande banque est forcée de transmettre des données confidentielles et que le gouvernement suisse abandonne la distinction entre fraude et évasion fiscale.

 

Alors victorieuse la Suisse? Oui si tant est que l’on considère qu’une gazelle qui s’est soudainement dégagée des crocs d’un lion après avoir été sérieusement mâchouillée est victorieuse.