Gaza: le silence d'Obama ternit précocement son auréole
Par Pascal Riché
01/09/2009
Pour faire une guerre, il
faut faire de nombreux calculs. Les forces ennemies, la météo, les kilomètres, les stocks de munitions. Et les calendriers électoraux. Celui des Etats-Unis a joué un rôle
dans le conflit au Proche-Orient: la guerre a été engagée entre une présidence mourante et une autre à naître.
Pour les ISraéliens, il n'y avait
pas de moment plus favorable pour "aller trop loin"
George W. Bush a épousé sans surprise la position
de ces derniers -il l'a toujours
fait, se démarquant (sciemment?)
de la politique de son père.
Ce fut en quelque sorte son cadeau de fin de présidence. Quand à Barack Obama, il a raté une bonne
occasion de ne pas se taire.
Le démocrate,
qui a promis une
"nouvelle diplomatie", aurait
pu redonner de l'espoir aux peuples de la région, Israéliens comme Palestiniens; il s'est borné
à exprimer ses "inquiétudes". Aller au-delà "ne serait pas prudent
pour le peuple américain",
s'est-il justifié.
Barack Obama était un rayon de lumière de la fin de l'année
2008. L'Irak, la crise financière, le racisme, le capitalisme débridé... il allait
peut-être tourner la page, rêvait la planète [1]. Et, par ces temps assombris, comme l'espérance est violente!
En se taisant,
sous prétexte qu'il n'y a "qu'un président à la fois aux Etats-Unis", il a rappelé
l'espérance à la niche. Il n'y a peut-être pas deux présidents à la fois, mais cela
n'empêche pas le nouvel élu de s'exprimer sur la crise économique.
En se taisant,
Obama marque une continuité. La politique américaine au Proche-Orient ne changera pas radicalement du jour
au lendemain, tant le lien
entre Washington et Israël est solide. Le temps est loin où James Baker osait "tordre le bras"
des Israéliens pour les amener
à la conférence de Madrid [2].
Jeudi, le Conseil de sécurité de l'ONU [3] a adopté une résolution
demandant un cessez-le-feu immédiat dans la bande de Gaza et un retrait complet de l'armée israélienne. Les Etats-Unis soutenaient publiquement le texte (qui peut s'opposer à un cessez le feu?)...
mais ils
se sont abstenus de le
voter, au prétexte qu'ils préfèrent attendre les résultats de la médiation égyptienne. Obama n'a pas fait
plus de commentaires.
Faut-il perdre tout espoir d'un changement? Pas forcément. Mais la politique étrangère d'un pays -a
fortiori celle du plus
puissant- ne change pas de cap comme le ferait un dériveur. C'est un paquebot,
poussé par une machinerie ancienne et cynique. Si ce
bateau prend un virage, cela prendra du temps.
A court terme,
il n'y
aura pas de miracle Obama. On s'en doutait bien sûr;
mais avant même que le 44e président ne s'assoie dans le bureau ovale, c'est désormais chose explicite.