H comme hardi

 

ÉDITORIAL Issa Goraieb

 

Translated By

 

June 6, 2009

 

Des millénaires durant, les sept plaies d'Égypte ont imposé leur loi à cette partie du monde en perpétuelle effervescence. C'est à l'heure des sept principes de Barack Obama, énoncés hier au Caire et traitant de questions aussi diverses que la paix, le nucléaire, le partenariat économique et l'émancipation de la femme, qu'est invité à vivre désormais le Moyen-Orient.

 

Thème principal, et même raison d'être de ce discours historique, la réconciliation de l'Amérique avec le monde arabo-musulman paraît passablement amorcée, en dépit des quelques voix discordantes inévitablement notées çà et . Fait significatif : alors que l'ayatollah Khamenei clamait la haine du fond de cœur qu'il continue d'éprouver pour les États-Unis, même ses protégés du Hamas palestinien étaient bien obligés de reconnaître qu'un changement tangible venait de se produire, ne fût-ce que dans le ton.

 

Pour cette opération main tendue, le successeur de George W. Bush ne manquait pas d'atouts, il est vrai : le plus évident de ceux-ci étant ce que l'on pourrait appeler le facteur H. C'est-à-dire ce second prénom de Hussein déclinant ses propres ascendances musulmanes, qu'il arbore fièrement et qui ne pouvait manquer de conforter l'authenticité de sa démarche. Plus exactement, c'est en extraordinaire produit de l'interpénétration des cultures qu'a réussi à se poser le patron de la Maison-Blanche, répudiant tous les préjugés et stéréotypes, allant jusqu'à contester aux pays occidentaux le droit d'interdire à leurs populations immigrées le port du voile et pourfendant néanmoins, avec la plus grande vigueur, ce dévoiement de la foi religieuse qu'est l'extrémisme violent.

 

 

C'est aussi en chef d'une Amérique résolue à promouvoir un règlement de paix, à s'y consacrer activement, et non plus à la manière d'un plus ou moins honnête courtier, qu'est apparu hier Barack Obama : la raison en étant que l'Amérique se découvre, sur le tard, concernée au plus près par un conflit dont elle subit dans sa chair désormais les retombées et contrecoups. Le président s'est abstenu de dévoiler à ce stade les détails de son plan de paix. Mais il n'a pas craint d'en réaffirmer les idées-forces, à savoir l'arrêt de la colonisation juive en Palestine et la règle des deux États, israélien et palestinien. Il aura à faire à rude partie certes, avec un Likoud réfractaire mais qui, à son tour, s'est bien gardé hier de rejeter abruptement le discours présidentiel. Mais sur ce terrain aussi, celui d'une épreuve de force avec Israël, Obama n'est pas dénué d'atouts : le moindre n'étant pas qu'il est le tout premier président des États-Unis à s'être rallié l'aile la plus modérée d'un lobby juif américain longtemps monolithique.

 

Autre première américaine non moins fracassante : le vibrant plaidoyer d'Obama pour la sauvegarde de cette inestimable source de richesse qu'est la diversité religieuse, qu'il s'agisse des maronites du Liban ou des coptes d'Égypte. Doublement importante, pour notre pays, est cette mention. Elle semble confirmer d'une part en effet la volonté de la nouvelle administration US à promouvoir et soutenir le rôle fédérateur du président libanais Michel Sleiman, quel que soit le résultat des législatives libanaises de dimanche prochain. À l'ensemble des Libanais, d'autre part, elle vient salutairement rappeler à quel point les actuelles tensions locales, avivées par la subversion étrangère, mettent en péril l'essence même de leur patrie.

 

C'est le vote chrétien qui déterminera la nouvelle majorité, est-il communément admis. Ce n'est cependant que la moitié de la vérité, car c'est aussi le statut, le poids des maronites eux-mêmes, sinon leur vocation historique, qui en sera inexorablement affecté. Révolution du Cèdre ou alliance d'opportunité avec l'axe syro-iranien, chrétienté citoyenne ou simple minorité chrétienne protégée par des armes non chrétiennes, c'est l'électeur qui tranchera. Conjurer le spectre d'une coptisation rampante, c'est d'abord la responsabilité des chrétiens.

 

Issa GORAIEB

 

igor@lorient-lejour.com.lb