Oui,
il peut
!
L'éditorial
de Issa GORAIEB
Historique. Hormis quelques grincheux, le monde entier n’avait hier que
ce mot à la bouche. Car il
est intimement convaincu, le monde – y compris
les grincheux, cette fois – que jusque
dans ses confins les plus reculés, il va se trouver
concerné tôt ou tard,de près
ou de loin, par la triomphale
installation de Barack Hussein Obama à la Maison-Blanche.
Qu’on l’admette ou qu’on s’y refuse, s’en félicite ou
non, c’est véritablement le
premier président de la globalisation
que l’on a là.
Pour se faire, l’histoire n’aura pas attendu le sacre de Washington,
supershow comme seuls savent en produire les Américains, tout à la fois imposant de solennité, émouvant de ferveur populaire et empreint
néanmoins d’une fort sympathique bonhomie. Elle s’était
déjà accomplie, l’histoire,
au soir de l’élection présidentielle US, avec ce jubilant yes, we can (oui,
nous pouvons) devenu, depuis,
la devise de toutes les sociétés
interdites de rêve. Et elle était
déjà en marche le jour, pas si
lointain, où un Américain de race noire se hasardait
à briguer l’investiture de
son parti, bousculant ainsi, puis finissant
par écraser des célébrités confirmées.
Ce qui va suivre
à présent c’est encore de l’histoire bien sûr, mais une
histoire en pièces détachées,
dont seul le temps sera juge : une séquence
de pans d’actualité, un inévitable
mélange de grandes réalisations,
telles qu’on est en droit d’en
attendre d’hommes d’exception, mais aussi de toutes ces déconvenues, ratés et échecs inhérents, hélas, à la condition humaine. La crise économique mondiale, le chômage et la pauvreté, le
changement climatique, les guerres
américaines laissées en héritage par George W. Bush, et en prime tous les autres conflits embrasant épisodiquement quelque coin de la
planète Terre : c’est un
cahier des charges on ne peut plus chargé, précisément, qui échoit à Barack Obama.
Pour le nouveau président, il va
s’agir tout à la fois de redonner confiance et tonus à un
immense pays vivant mal, depuis des années, son statut d’unique superpuissance, avec tous les privilèges et
obligations qui en découlent, et de regagner les faveurs d’une communauté internationale en rupture avec l’unilatéralisme
et les errements, souvent sanglants, de l’Oncle Sam. Cette double priorité, Obama l’a clairement déclinée d’ailleurs dans son discours d’investiture, se posant en rassembleur d’une Amérique prête à diriger le monde à
nouveau, une Amérique résolue à vaincre le terrorisme mais proposant dans le même temps au monde musulman une nouvelle approche.
Dès lors, c’est
aussi un double devoir – de confiance, d’espérance, d’optimisme, mais aussi de réalisme, de patience – que commande à toutes les nations la grandeur du moment. N’attendons pas trop vite, certes, d’Obama une profusion de
miracles. Parions en revanche
(a-t-on vraiment le choix
?) sur l’aptitude de ce fils d’émigré africain, de cet Américain réunissant
en sa personne diverses sensibilités, à poser un
regard lucide et compréhensif
– un regard intelligent après toutes ces années de stupide
dogmatisme – sur le monde alentour. Sachons entretenir en lui l’ambition d’accomplir ce que n’ont pu faire ses prédécesseurs, à savoir une solution globale, juste et définitive, du rébus de Palestine : un défi à la
mesure de ce briseur de barrières entré vivant dans la légende.
À défaut
de prodiges, ce que peut, ce
que doit faire Barack
Obama, c’est d’encourager,
de par le vaste monde, la même
quête de changement, de justice et de progrès qui, telle une déferlante, l’a porté au pouvoir.
Ce dont notre
région a le plus besoin en effet, c’est bien,
pour reprendre les propres termes du président US, de chefs œuvrant à édifier, et non à détruire.
Israël désertant, juste à temps pour l’investiture d’hier, la scène du crime à Gaza ; et au sommet de Koweït, des Arabes que l’on
a vus une fois de plus aussi prompts à s’étouffer en embrassades qu’à s’injurier comme charretiers. Le décor est planté.
Please welcome President Obama...
Issa GORAIEB
igor@lorient-lejour.com.lb