La Leçon Turque

 

par K. Selim

 

Trois jours après leur agression en haute mer, les Israéliens maintiennent un véritable blocus de l'information sur le nombre exact de victimes et leurs nationalités. Mais au fil des libérations des otages détenus par Israël, les circonstances de l'assaut criminel de ses troupes «d'élite» se confirment. Les Israéliens ont fait usage de leurs armes avant même de prendre pied sur les navires. Les militants, immédiatement brutalisés, se sont défendus avec des moyens de fortune, des bâtons et des chaises essentiellement.

 

 Au fil des libérations d'otages et des témoignages, les scénarios péniblement mis au point par les officines sionistes et complaisamment répercutés par les médias occidentaux se délitent complètement. Ils ne convainquent même pas ceux qui sont chargés de les relayer.

 

 Dans la stupeur générale encore palpable et les demi-condamnations bégayantes des défenseurs occidentaux des droits de l'homme, seule la voix de la Turquie est clairement perceptible. Il s'agit, selon tous les juristes et experts indépendants, d'une situation extrêmement grave, sans précédent, des navires chargés d'aide humanitaire et transportant des militants pacifistes ont été très violemment arraisonnés dans les eaux internationales. Les assaillants ont tué des individus désarmés, saisi des navires et ont pris en otage les personnes à bord, les frappant pour certains et les plaçant tous en détention.

 

 Les Turcs, par la voie de leur Premier ministre et du ministre des Affaires étrangères, réaffirment leur exigence d'une commission d'enquête internationale, appuyés en cela par le Conseil des droits de l'homme des Nations unies.

 

 L'affaire jette une lumière crue sur les mœurs israéliennes et les méthodes criminelles auxquelles ils ont systématiquement recours dans le quotidien de l'occupation et du blocus de Ghaza. De ce point de vue, l'objectif des humanitaires consistait précisément à fracturer le siège imposé à un million et demi de Palestiniens. Le message destiné à l'opinion mondiale et aux dirigeants occidentaux a été parfaitement transmis. Beaucoup de voix s'élèvent pour exiger la fin de ce blocus. Les Turcs conditionnent la reprise de relations normalisées avec Israël à la levée de ce blocus. Les réactions d'une grande dignité, mais très fermes, des responsables turcs sont à la hauteur de la crise internationale provoquée par les terroristes israéliens.

 

 La leçon turque aux régimes arabes «modérés» est rude. La Turquie démocratique, membre important de l'OTAN et allié traditionnel des Etats-Unis, démontre un degré d'autonomie auquel sont loin de prétendre ceux qui aspirent à jouer les rôles de leaders du monde arabe. Dans le paysage sinistre de la capitulation, la réouverture du point de passage de Rafah est un minimum qui doit absolument être maintenu. La position turque le démontre, l'alignement aveugle sur les Américains est une voie sans issue.

 

 Faut-il attendre de ces régimes qu'ils fassent pression sur les Occidentaux, et sur le quartet en particulier, pour la levée immédiate et sans conditions du siège de Ghaza ? Ce qui est sûr est que la défaite politique israélo-américaine en Méditerranée orientale sanctionne avec une égale sévérité l'échec des «modérés».