L'Iran sait ce qu'il veut et comment y parvenir
par Kharroubi Habib
Le régime iranien n'est pas ragoûtant. Ses dirigeants
ne sont pas fréquentables
aux yeux des plus tièdes démocrates. Cela étant, il
ne faut surtout pas traiter ces derniers
en illuminés qui ne savent
pas ce qu'ils veulent.
Depuis sa fondation,
la République islamique d'Iran travaille avec une rare obstination et constance à réunir les conditions
et moyens de s'ériger en
puissance régionale et, in fine, en acteur non négligeable sur la scène internationale. Ces deux objectifs
sont atteints quelle que soit
l'issue de la crise dont l'Iran est l'un des protagonistes pour cause de ses
ambitions nucléaires. Au Moyen-Orient,
ce pays est
désormais le passage obligé
pour tous les accords qui viseraient
à en pacifier et à stabiliser la situation.
En face, le monde arabe
assiste impuissant à sa montée en puissance, au
point d'en être à rechercher frileusement le
parapluie occidental et celui d'Israël,
y compris au prix de toutes
les compromissions avec ceux-ci.
Au résultat, il
faut faire litière de la présentation occidentale qui fait
des dirigeants iraniens d'irrécupérables interlocuteurs
de la «communauté internationale».
Ce n'est pas le point de vue des chancelleries et diplomaties
de cette partie du monde dont l'entregent et «la finesse»
se sont brisés sur l'intelligence manoeuvrière de ces dirigeants iraniens et leur pragmatisme.
Avec Israël et la Turquie, l'Iran
est désormais une puissance dominante dans la région et même au-delà en direction de l'Asie centrale.
Ce statut va faire que Téhéran va
être progressivement intégrée dans le dispositif géostratégique que les Etats-Unis cherchent à constituer et qui leur vaudrait d'avoir
les gendarmes locaux en situation de leur garantir la perpétuation de leur mainmise sur les richesses énergétiques de la région et le «containement» de la
nuisance terroriste.
Il nous sera opposé que les rapports conflictuels entre l'Etat sioniste et l'Iran des mollahs démentent la probabilité d'un tel scénario à venir. En apparence seulement, car là aussi, il faut faire «confiance» au pragmatisme des détenteurs du pouvoir à Téhéran. La «haine» qu'ils développent à l'encontre de l'Etat sioniste, et qui n'est destinée qu'à la consommation de leur opinion nationale et de celles du monde arabo-musulman, n'est ni doctrinale
ni éternelle. Donc sujette à disparaître en contrepartie de la
prise en compte des intérêts considérés par ces mollahs comme
étant ceux de la nation perse. Le «scandale de l'Irangate» dans les années 80 a démontré que quand leurs
intérêts nationaux ont convergé, Israël
et la République islamique d'Iran ont su et pu
transcender leur supposé antagonisme irréconciliable.
Seuls les Etats arabes seront
au final les grands perdants
de ce «grand jeu» qui a cours dans leur région.
Tant pour les Etats-Unis et l'Occident que
pour Israël et l'Iran, ce sont en effet
ces pays qui sont le problème au Moyen-Orient et non
des acteurs à la solution de celui-ci.
C'est en partant de ce
paramètre qu'il faudra décrypter l'évolution des relations de Téhéran
avec la «communauté internationale»
dans les semaines et les années à venir.