Triste photo
par K.Selim
Il fallait
une photo et il y a eu photo. Barack Obama, Benyamin Netanyahu et Mahmoud Abbas à la pose à New York. On peut imaginer sans peine la légende mensongère qui nous est suggérée : il existe
encore un processus de paix.
Des trois qui ont posé, le chef de la très problématique «Autorité palestinienne» avait le plus à perdre. Lui-même et ses collaborateurs ont tellement seriné
qu'ils ne rencontreraient
pas Netanyahu juste pour la pose. Et il l'a bien
faite la triste pose. Bien sûr, il était
difficile de la refuser à l'administration américaine qui l'a exigée.
Mais on connaît bien les triviales raisons de la chose. Les démocraties
occidentales ont réussi la perversion majeure de décider
que chez les Arabes, ce sont eux
les pourvoyeurs de légitimité
et non les urnes.
Mahmoud Abbas, dont le parti a
été vaincu par les urnes et qui est un président de fait et non de jure - son mandat
a déjà expiré -, le sait.
Il sait que sa photo avec Netanyahu, «purificateur
ethnique» agréé par la «civilisation», ne lui apportera pas un surcroît de popularité chez les Palestiniens.
Mais comme d'autres dirigeants arabes, il a parfaitement
intégré l'idée que ce ne sont
pas les Palestiniens qui comptent,
mais les Américains en particulier et les Occidentaux en
général. Le modus operandi est
rodé, il suffit de se poser en barrière contre l'islamisme. Electoralement, une photo avec un
Premier ministre israélien
qui annonce à Barack Obama qu'il
continuera à coloniser les territoires palestiniens et qu'il n'acceptera jamais que des bantoustans, quitte à concéder à les appeler «Etat», est désastreuse.
Mais depuis la dernière victoire électorale du Hamas et l'encerclement «civilisé» des électeurs palestiniens qui s'en est suivi,
on est suffisamment édifié sur le fait que les élections chez les Arabes, cela ne compte pas beaucoup.
Mahmoud Abbas pouvait-il refuser la photo du
faux-semblant ? Théoriquement, oui. Il est bien
un dirigeant du Fatah, qui signifie
«mouvement de libération de
la Palestine». Si le dernier congrès du Fatah - organisé en «territoire occupé», ce qui constitue une première peu réjouissante - a bien relevé que
s'il faut aller vers la négociation,
il s'est réservé le droit naturel à la résistance. Refuser
de se faire prendre en photo avec Benyamin Netanyahu aurait été un signe
de «résistance pacifique», le seul
risque encouru étant de fâcher l'administration américaine. Cela n'est même
pas un risque. Il fallait
au contraire «fâcher» l'administration
Obama et lui signifier que ses petits discours
sur le refus de reconnaître «la légitimité de la poursuite de la colonisation» sont terriblement complaisants.
Il faut en effet relever que
Barack Obama veille à faire dans
«l'équilibre» en assortissant
cette remarque par une exigence à ce que les Palestiniens
cessent les «provocations envers
Israël». Mahmoud Abbas et
son équipe d'éternels «négociateurs» ne peuvent ignorer que la pire provocation est l'occupation et la colonisation israéliennes. Ils auraient pu
voir dans l'arrogant refus d'Israël de sauver la face d'Obama sur la question de la colonisation la preuve qu'il fallait «fâcher» l'administration. Apparemment, ceux qui ne font que négocier du vent depuis les accords d'Oslo ne savent fâcher que
les Palestiniens. C'est pour cela qu'ils
ont accepté la triste photo de trop. Ce ne sera malheureusement pas la dernière...