Obama descend de son nuage
par Kharroubi Habib
L'état de grâce dont a bénéficié le président américain Barack Obama à son installation à la Maison-Blanche n'aura duré qu'un semestre. En quelques semaines, sa
cote de popularité a perdu dix points. Et ce qui lui vaut cette
dégringolade, ce ne sont pas les dossiers internationaux
qu'il a sur son bureau -
Iran, Palestine, Irak, Afghanistan pour les plus sensibles -, pas même celui de la crise économique et financière qui persiste aux Etats-Unis, mais la réforme de l'assurance maladie, dont on a pourtant dit que sa
promesse avait beaucoup contribué à son élection.
Si le thème a été électoralement porteur pour le candidat Obama, il s'avère que
sa mise en oeuvre rencontre des oppositions dont,
en tant que président, il a mésestimé l'ampleur, au point qu'il a, dans une
conférence de presse le 10 août, fait l'aveu «que faire comprendre à ses compatriotes la complexité de son projet était la pire épreuve
qu'il ait connue au cours de sa vie publique».
Pourquoi donc une réforme
généreuse dans ses intentions, puisqu'il s'agit d'étendre la couverture sociale à la couche populaire la plus pauvre du pays (près de quarante-cinq millions de citoyens)
qui, faute de moyens
financiers, n'y a pas accès ? C'est
que par ces temps de crise économique, les Américains se refusent à une générosité sociale qui est synonyme pour eux d'augmentation de leurs impôts pour financer un projet dont le coût est
estimé à 1.000 milliards de dollars sur dix ans. Et cela même si
Obama leur a affirmé avoir trouvé les deux tiers de la somme sans avoir à recourir aux
augmentations d'impôts honnies.
Il faut dire que les adversaires, et ils sont nombreux,
de Barack Obama lui ont savonné le terrain en engageant contre sa réforme
une campagne féroce en jouant sur cette phobie
anti-impôts de leurs concitoyens et en en dénonçant l'esprit «étatiste» auquel ils sont tout aussi
réfractaires.
Ceux qui mènent l'offensive contre le projet de réforme du président américain sont bien entendu les républicains, qui trouvent dans ce combat l'occasion de se refaire «une santé» politique et électorale en prévision des élections législatives et sénatoriales de la mi-mandat, en novembre 2010. Ils
ont obtenu l'appui des compagnies d'assurances hostiles par intérêt
au projet, qui dépensent
des millions de dollars en spots télévisés et blogs dénonciateurs. Mais aussi celui
des démocrates conservateurs
qui, sur le sujet, sont plus solidaires avec eux qu'avec le chef de file de leur camp politique.
L'offensive anti-réforme porte puisque
les Américains ne sont
plus, selon les sondages, que 49% à approuver le projet, alors qu'ils
étaient 72% au début. Obama a contre-attaqué en se faisant plus
critique contre l'héritage que les républicains et les mandats de George W. Bush ont laissé à l'Amérique.
Mais il lui faut
maintenant prouver sa détermination à mener à bien «la grande oeuvre de son programme», contrairement à ce qu'avait fait son prédécesseur démocrate Bill Clinton, qui avait
renoncé à la même ambition devant la levée de boucliers de ses adversaires.
L'on comprend que dans
cette situation Barack Obama est plus engagé sur le front intérieur (crise économique en plus aussi) qu'en politique
étrangère, même si des urgences l'interpellent à ce niveau aussi. Et
il n'a pas tort car il sait qu'en
l'affaiblissant par un échec
au plan intérieur, ses adversaires visent à le dissuader
de mener une politique étrangère de rupture
avec l'ère George W. Bush. Et
tout cas, le vent de «l'obamania»
béate est retombé.