Un
peuple debout, des régimes couchés
par K. Selim
Dans l'imaginaire brutal des colonialistes, les exactions et
les crimes commis par leurs
troupes contre des populations désarmées
sont des faits d'armes et, en tant que tels, s'intitulent
«batailles» et portent les noms
des villes dans lesquelles ils ont lieu. On se souvient
de la «bataille» d'Alger
qui opposa les hordes parachutistes
d'une armée de tortionnaires à la population civile.
Les atrocités commises à Ghaza par une autre
armée coloniale, avec la bénédiction de la «civilisation occidentale», commencent ainsi à être génériquement
dénommées «Bataille de Ghaza». Cette appellation est l'exacte
mesure des capacités de distorsion de la réalité d'une propagande fondée sur le mensonge
et l'intoxication.
Utiliser des armes du champ de bataille contre une ville assiégée
depuis près de deux ans constitue
un crime de guerre en bonne
et due forme. Les missiles américains
tirés par des avions américains qui s'abattent sur la ville désarmée
sont l'expression achevée de la lâcheté israélienne et de l'indignité de ses soutiens en Europe et aux Etats-Unis.
Mais plus que l'attitude somme
toute naturelle de ceux dont l'histoire
est d'abord une épouvantable traînée de sang, c'est le silence
embarrassé des régimes arabes
«modérés» qui apparaît dans le triste éclat de son indignité. Pendant que des enfants arabes meurent, des mosquées sont détruites et
des hôpitaux ciblés, l'on assiste à un curieux spectacle. Celui du
régime qui se veut le gardien
des lieux saints et celui qui prétend incarner l'arabité se livrant à des contorsions lamentables. Les atermoiements égyptiens quant à l'ouverture du
passage de Rafah resteront dans l'histoire comme un moment difficile à surpasser en matière de couardise.
Que les dirigeants «modérés» n'apprécient guère le Hamas est une chose que l'on
peut comprendre, ce qui reste inexcusable est de tourner de la sorte le dos aux souffrances de
la population civile d'un pays voisin.
Dans cette
cacophonie de réunion tardive de la Ligue arabe et de tergiversations, une voix incarne de manière juste l'esprit
de résistance et la solidarité partagés
par tous les peuples arabes. Hassan Nasrallah a bien exprimé avec force et clarté la ligne
unanime de l'opinion arabe et musulmane. Son discours pédagogique
a permis de situer le rôle de ces régimes arabes qui ont érigé la capitulation en système.
Le parallèle avec la guerre de juillet
2006 est en effet frappant. Au mépris des faits,
ceux qui accusaient le
Hezbollah d'aventurisme sont
les mêmes qui accusent aujourd'hui le Hamas d'avoir rompu la trêve. En appelant la population égyptienne
à descendre dans la rue, il a mis une
pression réelle sur le régime cairote, contraint à manifester, malgré lui, le minimum de l'ouverture du passage de Rafah
pour l'aide humanitaire.
Les Israéliens
n'ont pas tort en proclamant
que leur offensive n'en est
qu'à ses débuts. Ce n'est en effet qu'un commencement. La vraie
bataille de Ghaza aura lieu
tôt ou tard,
elle opposera des armées les unes aux autres et ne sera pas un
face-à-face inégal entre un Goliath surarmé et un David affamé.
En attendant, le peuple palestinien montre au monde entier qu'il est
debout et les régimes arabes
«modérés» montrent, une fois de plus, qu'ils sont définitivement
couchés.