M. Obama veut solder les années Bush
25.05.2013
L
es Américains sont-ils prêts à tourner la page du 11-Septembre ? Les Etats-Unis
peuvent-ils solder les années
Bush et mettre fin à la "guerre mondiale contre le terrorisme" ? Le président
Obama l'a souhaité, dans un éloquent et important discours prononcé jeudi 23 mai devant
la National Defense University. Pour lui, "cette guerre, comme toutes les guerres, doit prendre fin. C'est ce que
l'Histoire nous conseille. C'est ce que
notre démocratie exige".
Ce discours est en lui-même un aveu d'échec : M. Obama avait déjà émis le désir d'en finir
avec la stratégie antiterroriste
de l'administration Bush-Cheney pendant sa première campagne électorale, en 2008. Au cours de
son premier mandat, il a abandonné la rhétorique bushienne de la lutte antiterroriste, mais pas ses méthodes. Il n'a plus été question, dans le vocabulaire présidentiel américain, de
"guerre globale contre
la terreur" ni d'"islamo-fascistes". Mais
le président démocrate n'a pas réussi à tenir sa promesse
de fermer le camp de Guantanamo, où
166 suspects sont toujours détenus sans jugement, dont une centaine
sont en grève de la faim. Et les frappes menées à l'étranger par les drones pour liquider
des cibles considérées comme une menace terroriste se sont multipliées, sous l'égide de la CIA.
Barack
Obama a maintenant entamé
son deuxième et dernier mandat
à la Maison Blanche, celui
au cours duquel il peut songer
à l'empreinte qu'il veut laisser sur
son pays, sans se préoccuper de sa
réélection. Rebâtir l'image de la démocratie américaine dans le monde arabo-musulman, où elle a particulièrement souffert des abus de la guerre antiterroriste, est une mission que l'on ne peut que
saluer.
Le
chef de l'exécutif a donc
exposé, dans ce discours, un réaménagement de l'arsenal de la lutte antiterroriste visant à le mettre plus en accord avec les valeurs
américaines. Ce seront désormais les militaires, et non plus la CIA, qui décideront
des frappes menées par les drones. Les critères de ces frappes et le choix des cibles seront plus strictement encadrés, de façon à permettre une meilleure
supervision démocratique et à éviter
au maximum les victimes civiles.
Il
s'est aussi engagé - une nouvelle fois - à fermer la prison de
Guantanamo. A cette fin, il
a demandé au Congrès de
lever les restrictions qui empêchent le transfèrement des 86 détenus jugés libérables et de l'aider à résoudre le casse-tête juridique créé par le statut des prisonniers et le recours à la
torture pendant leurs interrogatoires.
En
bon juriste, Barack Obama a parfaitement
énoncé le défi que pose la permanence de la menace terroriste
aux sociétés démocratiques
: "trouver le bon équilibre
entre les besoins de notre sécurité et la sauvegarde des libertés qui nous définissent".
Après les attentats du 11 septembre
2001, les Etats-Unis ont trop mis l'accent
sur l'impératif sécuritaire. M. Obama veut faire revenir le balancier dans le sens des libertés. Il a raison, même si, comme souvent
chez lui, son discours est resté très
incantatoire.
En
douze ans, la menace terroriste a évolué. Elle est moins massive, plus diffuse, mais fait néanmoins partie de notre quotidien. Et le récent scandale de la surveillance secrète
de journalistes aux Etats-Unis
montre à quel point
"le bon équilibre" est
difficile à maintenir. M.
Obama n'a pas donné toutes les solutions, mais il a le mérite d'avoir pris les bons engagements.