Quand la guerre est là, il
faut la gagner
Alexis Brézet
FIGAROVOX/ÉDITORIAL - Après les attentats qui ont frappé la rédaction de Charlie Hebdo, le directeur des rédactions du Figaro appelle à l'union nationale et à une riposte sans faiblesse contre le terrorisme.
C'est une guerre, une vraie guerre, menée non par des soldats mais par des assassins de l'ombre, des tueurs méthodiques et organisés, dont la tranquille sauvagerie glace le sang. Elle a tué, hier, en plein Paris.
Cette guerre, longtemps nous n'avons pas voulu la voir. Elle se déroulait si loin de nous, n'est-ce pas?, aux confins de la Syrie, de l'Irak, du Nigeria ou de la Libye… Par scrupule - sans doute par peur aussi -, nous n'osions pas même dire son nom. Les oiseaux de mauvais augure qui ne craignaient pas d'enfreindre la consigne étaient promptement disqualifiés. Les signes avant-coureurs - ces «gestes fous» commis à Noël encore par des «déséquilibrés» - aussitôt minimisés. Depuis hier, les euphémismes ne sont plus de mise: c'est une guerre, une vraie guerre, qui nous a été déclarée: la guerre du fanatisme islamiste contre l'Occident, l'Europe et les valeurs de la démocratie.
Ne nous y trompons pas. Si la France est aujourd'hui dans la ligne de mire des fous d'Allah, d'autres pays libres le furent hier, et d'autres le seront encore demain. Au fond, ce n'est pas telle ou telle nation qui est visée, mais un mode de vie, des valeurs, une civilisation - la nôtre - pour qui la femme est l'égale de l'homme, les droits de la conscience une exigence non négociable et la liberté d'expression un impératif absolu. En assassinant des journalistes et des policiers - qu'il ne faudrait pas oublier -, les terroristes n'ont pas frappé au hasard. Ils ont visé au cœur la liberté de pensée et ceux qui la protègent, et à travers eux la Démocratie et la République, qui sont les deux piliers de notre nation.
Face à la guerre, le premier devoir est de s'unir. Quelles que soient nos origines, nos opinions, nos religions ou nos options politiques, proclamer immédiatement et sans barguigner l'union sacrée. Rien ne serait pire, dans l'épreuve que traverse notre pays, que de faire cadeau à l'adversaire de querelles de bas étage ou de divisions politiciennes. Il faut saluer à cet égard la dignité de nos responsables publics qui, président de la République en tête, ont su trouver les mots qu'il faut. Saluer aussi ces représentants de la communauté musulmane qui ont crié haut et fort l'horreur que leur inspirent les crimes abjects de ces barbares déguisés en dévots.
Mais le second devoir est de s'armer. Moralement, d'abord - comment défendre nos valeurs si nous ne sommes pas convaincus de leur prééminente dignité? Politiquement et juridiquement, ensuite: trop longtemps, au nom d'un humanisme perverti, d'un antiracisme dévoyé, nous avons fait preuve de complaisance envers nos pires ennemis. Ces «enfants perdus du djihad», ces fanatiques qui se déchaînent sur Internet, mais aussi ces groupes d'influence qui, drapés dans leurs oripeaux «communautaires», conspirent à ciel ouvert contre notre pays et sa sécurité. Contre ceux-là, nous devons frapper. Sans faiblesse ni pusillanimité. Quand la guerre est là, il faut la gagner.