Le rapprochement USA-Russie inquiète l'Europe de l'Est

 

Par Maurin Picard

 

09/04/2010

 

L'apparente lune de miel entre Obama et Medvedev réveille de vieilles craintes à Prague, Varsovie, Budapest et ailleurs, le souvenir de l'occupation soviétique demeure très présent, dix-neuf ans après la fin de la guerre froide et la désagrégation de l'URSS.

 

À Prague

 

Une fois la poignée de main historique échangée avec Dmitri Medvedev, jeudi à Prague, Barack Obama n'était pas ­encore tout à fait au bout de ses peines. Tandis que le président russe regagnait Moscou sitôt la cérémonie de signature du traité Start terminée, son homologue américain s'apprêtait à prolonger son séjour de quelques heures dans la capitale tchèque. Le temps de recevoir à dîner onze chefs d'État et de gouvernement d'Europe centrale et orientale à la résidence de l'ambassadeur américain, avant de redécoller vendredi matin pour Washington à bord d'Air Force One.

 

Faire pièce aux visées russes

Loin d'être une formalité, ce repas entre alliés revêtait une importance capitale pour le chef de la Maison-Blanche, qui devait entendre les doléances de ses interlocuteurs tchèques, slovaques, polonais, hongrois, roumains, bulgares et baltes, passablement remontés contre l'apparente lune de miel entre leur hôte et Dmitri Medvedev.

 

Au cœur du continent, autrefois ligne de fracture entre l'Alliance atlantique et le pacte de Varsovie, le rapprochement stratégique russo-américain ne fait pas que des heureux. À Prague, Varsovie, Budapest et ailleurs, le souvenir de l'occupation soviétique demeure très présent, dix-neuf ans après la fin de la guerre froide et la désagrégation de l'URSS. Depuis une décennie, les anciens États satellites de Moscou avaient cru se prémunir contre une résurgence de l'impérialisme russe en adhérant l'un après l'autre à l'Otan. Mais voilà que la nouvelle doctrine nucléaire de Washington, dévoilée mardi, et l'accord Start de réduction des arsenaux russes et américains, après la crise géorgienne de l'été 2009, viennent réveiller de vieilles craintes.

 

«En signant ce traité en République tchèque, un État membre de l'Union européenne et de l'Otan, tempère Jiri Schneider, directeur de l'Institut d'études de sécurité de Prague, les États-Unis affirment symboliquement leur implication dans la sécurité européenne et la désué tude des vieilles divisions Est-Ouest. Mais le risque existe aussi que les Russes profitent de cette visite pour dire: nous sommes , et vous êtes toujours dans la sphère d'influence russe

 

En juillet 2009, l'ancien président tchèque Vaclav Havel et son confrère polonais Lech Walesa, appuyés par de nombreux dirigeants est-européens, s'étaient fendus d'une lettre ouverte à l'Administration Obama, lui enjoignant de maintenir sa présence dans la région et de faire pièce aux visées russes. Leurs successeurs espèrent à présent que cet appel a bien été reçu.