La croisade antinucléaire d'Obama
Par Pierre Rousselin
le 6 avril
2010
La nouvelle doctrine de recours à l'arme nucléaire des États-Unis vise avant tout à reprendre l'initiative pour mieux combattre la prolifération. Le Pentagone a annoncé,
hier, que l'Amérique allait réduire le rôle de sa dissuasion nucléaire dans sa panoplie
militaire.
Washington ne renonce ni à moderniser
l'arsenal existant ni à la possibilité de se servir en premier de l'arme ultime, mais exclut
le développement de nouvelles
ogives et assure que la
bombe atomique ne sera utilisée
que dans des « circonstances extrêmes ». Elle
ne servira pas contre un adversaire qui ne la détient pas,
qui respecte le traité de
non-prolifération nucléaire
(TNP).
C'est la première fois que les États-Unis s'imposent de telles
restrictions. Barack Obama a, une nouvelle fois, voulu marquer
sa différence avec l'Administration de George W. Bush, qui, au lendemain du 11 septembre 2001, avait élargi le recours à l'arme nucléaire.
Les limites de ce genre de doctrine publiquement affichée sont évidentes. En cas d'attaque
menaçant leurs intérêts vitaux, les autorités américaines, comme celles de n'importe quel autre pays, ne seraient limitées dans leur
réaction par aucun document
interne. Il s'agit donc d'une « posture nucléaire » à usage externe, visant à montrer la bonne volonté des États-Unis, qui restent la première puissance nucléaire
au monde.
L'objectif prioritaire est d'isoler l'Iran
et la Corée du Nord. Bien que signataires du TNP, ces pays contreviennent à ses règles ou
s'en sont affranchis et se trouvent donc sous la menace explicite des États-Unis. Ménager les autres pays qui appliquent le TNP est censé être
une incitation au respect d'un traité
à l'efficacité contestée et
soumis à révision le mois prochain.
La nouvelle doctrine intervient à la veille de la
signature à Prague de l'accord de désarmement
Start avec la Russie et à quelques
jours d'un sommet à
Washington sur la sécurité nucléaire. Elle prépare
un retrait d'Europe des armes nucléaires tactiques américaines qui pourrait être entériné
au sommet de l'Otan en novembre à Lisbonne.
Barack
Obama poursuit sa vision à
long terme d'un monde débarrassé
d'armes nucléaires. C'est une croisade idéaliste qui se heurte à de nombreux obstacles. Mais c'est
une option délibérée, qu'il a mise au centre de sa diplomatie et qui va marquer sa
présidence.