Obama, de la théorie
à la pratique
Par
Pierre Rousselin le 28 octobre 2009
EDITO Si Barack Obama prend si longtemps pour se décider sur l'Afghanistan,
c'est que le choix qu'il va
faire n'est pas simple. Mais
le temps qui passe n'aide
en rien.
En mars, tout feu tout flamme, il dévoilait une
nouvelle stratégie pour gagner
la guerre. On allait mener
un combat anti-insurrectionnel,
et pas seulement antiterroriste.
Le général
Stanley McChrystal était
chargé de faire ses recommandations
et expliquait le changement : plutôt que tuer
un maximum de talibans et de combattants
d'al-Qaida, nos soldats devraient protéger les Afghans et les aider à construire
un État viable.
Jusque-là, pas de problème. Sauf la question : pourquoi diantre, après huit ans de guerre, ne pas y avoir pensé plus tôt ?
Le général
McChrystal a répondu en septembre : pour avoir une chance de succès, il faudrait
augmenter les troupes de 40 000 hommes (le contingent américain sera de 68 000 hommes à la fin de l'année). Une réponse
qui appelle une nouvelle question : les militaires
ne vont-ils pas demander toujours
plus de soldats ?
Pendant ce
temps, à Kaboul, la fraude
massive a transformé en fiasco le premier tour de la présidentielle. Difficile, dans ces conditions, de demander
des sacrifices pour défendre un allié
déconsidéré.
De la théorie
à la pratique, Obama a décidément
du mal à franchir le pas. Une
fâcheuse impression d'indécision
s'est installée.
Le président
donne le sentiment de s'être
trop avancé en mars et de
ne pas savoir comment changer de pied. Craint-il, en donnant satisfaction à ses généraux, de mécontenter la
gauche du Parti démocrate dont il a besoin
pour faire adopter sa réforme
du système de santé ?
Depuis plus d'un mois, Barack
Obama hésite et consulte. Pourtant, octobre sera le mois le plus meurtrier pour les États-Unis, tandis que les talibans multiplient les attentats en plein Kaboul.
Son vice-président,
Joe Biden, l'incite à refuser
les troupes demandées, au
profit d'un effort accru contre
al-Qaida au Pakistan. L'idée fait son chemin d'un moyen terme : les alliés se concentreraient sur la défense d'une dizaine de villes et laisseraient aux talibans le contrôle d'une partie du territoire afghan.
Huit ans après le début du conflit, la guerre continue d'être menée
dans un vide stratégique,
sans que l'on sache très bien
quel est le but recherché.
Pas étonnant que les
opinions publiques soient sceptiques. S'il veut éviter la sanction des urnes aux élections de mi-mandat, il serait
temps qu'Obama se décide.