Polanski - l'affaire
judiciaire devient une affaire politique
Par
Yves Thréard
27 septembre
2009
L'arrestation de Roman Polanski à Zurich pour une
vieille affaire de moeurs
aux Etats-Unis vire à l'affaire politico-diplomatique. L'indignation manifestée en Pologne, pays d'origine du cinéaste, et en France, son pays d'adoption, est vive.
Ecoutons Frédéric Mitterrand, notre nouveau ministre de la
Culture : "De le voir ainsi
jeté en pâture pour une histoire ancienne qui n'a pas vraiment de sens et de le voir ainsi seul, emprisonné,
alors qu'il se rendait à une manifestation où on allait lui
rendre hommage, c'est-à-dire ainsi pris au piège, c'est absolument épouvantable. On sait les
conditions dans lesquelles c'est arrivé, et de la même manière qu'il
y a une Amérique généreuse que nous aimons, il y aussi
une certaine Amérique qui fait peur, et c'est cette Amérique-là
qui vient de nous présenter
son visage." Des propos propres à créer un différend diplomatique.
Première remarque : Mitterrand ne pointe pas là l'Amérique
de Bush, celle qui s'est
fait tant d'ennemis dans le monde, mais celle d'Obama, dont chacun répète
qu'elle a retrouvé visage humain ! Constat pas si anodin,
car on se demande bien pourquoi cette arrestation a lieu maintenant.
N'oublions pas toutefois que la justice aux Etats-Unis jouit d'une plus grande indépendance qu'en France par rapport au pouvoir
exécutif.
Deuxième remarque. Que va
faire la Suisse qui, décidément, n'est
plus ce qu'elle était ? Perdrait-elle sa neutralité ?
Paradis fiscal, elle n'est plus : elle
donne même les noms des contribuables étrangers venus se cacher chez elle. Un accord d'extradition de longue
date existe entre la Suisse et les Etats-Unis, donc Polanski peut être légalement
transféré outre-Atlantique.
La Suisse est-elle dans une période où
elle a intérêt à s'acheter une nouvelle conduite vis-à-vis de l'Amérique ? On peut se
poser la question.
Troisième remarque : Polanski est poursuivi pour avoir eu des relations sexuelles en 1977 avec une mineure âgée de 13 ans. Il avait alors plaidé
coupable, et passé 42 jours
en prison. Puis, sa peine devenant supérieure à ce qui avait été
convenu, il avait choisi l'exil
en 1978. L'histoire est vieille de 32 ans et la victime, dit-on, a retiré sa plainte depuis.
N'y a-t-il pas prescription ? Des éclaircissements
sont nécessaires.