Israël découvre le vrai Obama
Pierre
Rousselin
29/05/2009
L'éditorial
de Pierre Rousselin du 29 mai.
Entre Israël
et les États-Unis, le climat
n'est plus au beau fixe, comme
du temps de George W. Bush. L'insistance avec laquelle la nouvelle Administration rappelle
ses exigences au gouvernement israélien annonce des temps difficiles.
La rencontre
du 18 mai à la Maison-Blanche
entre Barack Obama et Benyamin Nétanyahou avait été jugée
cruciale pour les relations entre les deux pays et pour les perspectives de paix
au Proche-Orient. Il ne pouvait
en être autrement. En apparence, le tête-à-tête entre ces
deux hommes aux parcours politiques contrastés et aux positions parfois
opposées s'est fort bien passé, même s'il faudra du temps pour savoir ce qu'ils se sont
vraiment dit.
Chacun a rappelé publiquement ses convictions avec fermeté mais aussi avec beaucoup de
politesse.
Obama est
ainsi fait qu'il ne montre pas ses sentiments. Il ne
se départira pas de sa cool
attitude, même s'il n'en pense pas moins. Fin connaisseur de la vie politique américaine, Nétanyahou sait, lui, apprécier la popularité du nouveau président.
Inutile de le prendre de front. Entre les deux hommes, c'est
une rude partie d'échecs qui a commencé.
Le vice-président
Joe Biden était monté en ligne avant la venue de Nétanyahou à Washington. Maintenant,
c'est Hillary Clinton qui donne
de la voix. À l'entendre, il n'y a rien
à négocier : « Le président
Obama est très clair. Il veut la fin de la colonisation : pas de colonies, pas de postes
avancés, pas d'exceptions liées à la croissance naturelle » des colonies de peuplement
en Cisjordanie.
Nétanyahou pensait qu'il
avait en Hillary Clinton, l'ancienne
sénatrice de New York ouvertement
pro-israélienne pendant sa campagne, une alliée
au sein de l'Administration.
Il doit déchanter.
Le message d'Obama signifie qu'il ne fait aucun cas de la fragilité politique du gouvernement Nétanyahou et ne parie pas sur sa longévité.
Le premier ministre israélien
aura bientôt le choix entre
une crise politique intérieure ou une crise
avec les États-Unis ou,
plus vraisemblablement, les deux
à la fois.
Quant à Obama, il poursuit son chemin, imperturbable. Le 4 juin
au Caire, il prononcera son «discours au monde
musulman». On y découvrira
la feuille de route qu'il s'est tracée au Proche-Orient.
Les signaux
lancés par la Maison-Blanche
montrent que le conflit israélo-palestinien s'inscrit pour cette
Administration dans un cadre plus large. Israël reste l'« allié privilégié » des États-Unis qui demeurent les « garants » de sa sécurité. Mais Washington poursuit aussi d'autres objectifs dans la région et attend désormais de son allié qu'il y contribue.
Ainsi en est-il de l'amélioration souhaitée de
relations avec le monde arabe ainsi
que du règlement recherché
de la question iranienne.
Avec George W. Bush, Israël avait perdu
l'habitude de ce genre de discours. Les semaines qui
viennen²t nous diront s'il s'agit seulement d'un changement verbal ou bien si la politique
des États-Unis vis-à-vis d'Israël
est en train de se transformer en profondeur.