Vers une
nouvelle Alliance atlantique
03/04/2009
L'éditorial de Pierre Rousselin du 4 avril.
Dans un monde qui change, la relation transatlantique doit changer. Après
avoir donné, au G20, des gages de son approche multilatérale de l'économie
mondiale, Barack Obama s'est employé, à Strasbourg, à renforcer l'Alliance
atlantique.
Le président américain n'a eu qu'un peu plus de deux mois pour préparer ce
sommet de l'Otan. Compte tenu de l'énergie qu'il a dû consacrer à la crise
économique, c'est très peu.
La diplomatie de la nouvelle Administration est donc encore en
construction, en Afghanistan comme à l'égard de la Russie, de l'Iran ou du
Proche-Orient. Mais, déjà, quel changement dans le style et la manière de faire
!
Barack Obama s'est livré, devant des étudiants français et allemands réunis
à Strasbourg, à un numéro d'artiste, comme il en régalait les Américains
pendant sa campagne électorale. Il n'a pas son pareil pour séduire son
auditoire, avec élégance et humilité, reconnaissant les erreurs passées de
l'Amérique pour mieux faire passer son véritable message : «L'Europe ne doit
pas s'attendre à voir les États-Unis porter seuls le fardeau.»
Barack Obama est trop adroit pour formuler publiquement des exigences que
ses alliés ne seraient pas prêts à remplir. Il n'en reste pas moins que la
contribution européenne, en Afghanistan et ailleurs, sera appréciée à
Washington selon ses mérites. Pour le cas présent, il ne s'agit que de l'envoi
de quelques centaines de gendarmes chargés d'aider à la formation de la police
afghane.
Cela étant, avec Obama, la défense européenne n'est plus une source de
méfiance à Washington : les Alliés seraient plutôt incités à en faire
davantage.
Quant à la guerre d'Afghanistan, elle est en train de se transformer, du
moins dans la présentation qui en est faite. La «nouvelle stratégie», annoncée
le 27 mars à la Maison-Blanche, intègre bien des considérations que les
Européens ont défendues en vain pendant des années : la solution ne sera pas
militaire mais politique, l'approche doit être régionale et inclure le
Pakistan, l'«afghanisation» de la guerre est une priorité absolue…
Si l'Amérique se rapproche de l'Europe, le mouvement inverse est tout aussi
réel. En reprenant sa place dans le commandement intégré de l'Otan, la France
joue un rôle moteur. Nicolas Sarkozy en a été chaleureusement remercié par
Barack Obama, et les deux chefs d'État ont pu afficher une entente présentée
comme «parfaite».
Le soixantième anniversaire de l'Alliance atlantique, qui se tient à
Strasbourg et à Kiel, a, par ailleurs, une forte consonance franco-allemande.
Face à leur partenaire américain, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel ont une
nouvelle occasion de faire étalage de leur unité, déjà manifeste au G20 de
Londres. Cette entente, illustrée par l'installation en France d'une unité de
l'armée allemande, se présente comme un pilier de l'Europe de la défense.
Barack Obama sera dimanche à Prague pour le sommet UE-États-Unis. En
quelques jours, il aura jeté les bases d'une nouvelle alliance transatlantique.