Obama, Sarkozy: deux
volontarismes
26/03/2009
L'éditorial
de Pierre Rousselin.
Le même
jour, Barack Obama et Nicolas Sarkozy traitaient du même sujet. Le président américain tenait, mardi soir,
sa deuxième conférence de presse à la Maison-Blanche, peu après le discours du président de la République à Saint-Quentin. Les deux
hommes voulaient rassurer leurs opinions publiques, désorientées par l'ampleur de la crise. Ils voulaient prouver
leur capacité à remettre l'économie dans le bon sens.
Deux personnalités, deux styles opposés. Deux sociétés très
distinctes. Deux cultures diverses. Face à l'adversité, et
en l'absence de recette
miracle, c'est le volontarisme
qui s'impose, de part et d'autre
de l'Atlantique. Les problèmes
sont semblables, les remèdes pas forcément très différents. Et pourtant, la tonalité n'est pas la même.
C'est fou ce
que Barack Obama a changé
en neuf semaines. Le président, qui était une icône en arrivant
à la Maison-Blanche, a maintenant
les mains dans le cambouis.
Il n'est plus question d'«audace»
et d'«espoir» à toutes les
phrases. Chaque jour qui passe
et c'est un peu moins la faute de George W. Bush si l'économie américaine
est dans l'état où elle
se trouve. Alors, Obama s'est montré mardi
soir pédagogue, peu lyrique mais
appliqué. Il voulait défendre
son programme et, surtout, insuffler de l'optimisme et redonner confiance, après en avoir fait beaucoup, pendant les semaines
précédentes, sur
le côté apocalyptique de la
crise.
Avec Sarkozy, Obama partage le souci de répondre à l'indignation générale suscitée par les bonus et stock-options que
s'octroient les grands patrons d'entreprises sauvées par l'argent public. Comme le président français, Obama exprime sa «colère», parle
de comportements «inexcusables»
et en appelle au sens des «responsabilités». Mais il se défend de vouloir «diaboliser tout investisseur ou entrepreneur qui cherche à faire un profit».
On touche
ici à la grande différence entre les deux pays.
Pas question aux États-Unis, même
avec Obama, de « refonder le capitalisme»
ou même de le «moraliser», comme cela plaît tant
aux oreilles françaises. Il
s'agit là-bas d'éviter les grands mots, de faire en sorte que l'économie fonctionne mieux - certainement pas de changer de système.
Et si
Obama insiste pour que l'Europe relance davantage son économie, c'est parce que
les Américains pensent que les centaines de milliards qu'ils injectent dans leur propre
économie vont aider, sans contrepartie, les exportations européennes.
Pas un mot, en revanche, dans la bouche du président américain sur la réglementation financière, alors que Nicolas Sarkozy en fait
sa priorité pour le sommet du G20, la semaine prochaine à Londres. Il y a là matière à un vif désaccord. Sur la forme comme sur
le fond. Parce que les États-Unis veulent rester les maîtres de l'assainissement de leur système financier, qui sera décidé,
en temps voulu, entre la Maison-Blanche
et le Congrès.
Le G20, dont
Sarkozy attend beaucoup, n'est pour Washington que l'occasion de donner une impulsion. À cause de cette différence de points de vue, il ne faudrait
pas que le sommet de Londres soit l'occasion
d'un choc entre deux volontarismes.