Bush marginalize par son propre camp
Ph. G., notre
correspondant à Washington
Le président
en fin de mandat ne maîtrise
plus le jeu politique à
Washington, même face aux énormes
enjeux d'un «11 Septembre
financier».
Une
sorte de malédiction doit poursuivre George W. Bush. Le président qui avait débuté son premier mandat sous le choc des attentats du 11 septembre 2001, puis inauguré le second dans la débâcle de l'ouragan Katrina, est en train d'achever son passage à la Maison-Blanche
sous la menace d'un «11 Septembre
financier».
Sa réaction au premier séisme avait réalisé
«l'union sacrée» autour de lui, jusqu'aux premiers revers de
fortune en Irak. Le deuxième
a étalé au grand jour l'incompétence d'une
Administration mue par la seule
loyauté. Le troisième aurait dû corriger
ces mauvais souvenirs :
avec Henry Paulson, ancien patron de Goldman Sachs,
Bush a placé en 2006 à la tête
du Trésor américain un
expert des marchés financiers, qui a rapidement pris la mesure du mal et proposé un remède de cheval.
Renonçant à sa
philosophie économique «non
interventionniste», le président
lui a emboîté le pas. Mercredi soir, dans une allocution à la nation
(la sixième de son second mandat),
il a eu des accents solennels comme il y a sept ans. Renonçant à ne pas se mêler de la
campagne électorale, il a invité aux discussions les deux candidats à sa succession. Mais ses efforts ont
surtout souligné qu'il ne maîtrise plus
grand-chose du jeu politique
à Washington.
Vendredi matin, dans
le souci de calmer les marchés financiers, George
Bush a fait de nouveau une brève
déclaration à la Maison-Blanche : «Le processus législatif n'est pas toujours très joli.
Mais nous serons à la
hauteur des circonstances», a-t-il
dit, en promettant qu'«il y aura un plan de sauvetage» des marchés financiers.
Son commentaire fait allusion aux événements
de la veille, où son autorité a été mise à mal par son propre parti. La réunion organisée à la Maison-Blanche, en présence de
John McCain, de Barack Obama et des leaders des deux partis au Congrès, devait donner le sceau du consensus aux
propositions amendées de Paulson. L'Administration
avait acce-pté les exigences parlementaires d'une supervision accrue et de garanties pour les contribuables.
En fait, la séance a tourné à la foire d'empoigne.
Genou à terre
Lâché par la minorité républicaine
de la Chambre des représentants,
Bush s'est retrouvé dans la position inhabituelle de
devoir compter sur la majorité démocrate du Congrès. «Ne reprenez pas tout à zéro», a-t-il supplié ses amis conservateurs. Dans le couloir, Paulson a même mis un genou à terre devant Nancy Pelosi,
«speaker» démocrate de la Chambre : «Ne faites pas tout sauter», lui a-t-il demandé.
«Ce n'est
pas moi, ce sont les républicains», a rétorqué celle-ci. «Je sais, je sais», a soupiré Paulson.
Cette image inhabituelle symbolise le pouvoir qu'il reste à un président tombé à 26 % d'opinions favorables, face à un Congrès qui affronte lui aussi une
élection :
toute la Chambre et un
tiers du Sénat seront renouvelés le 4 novembre.