Le moment de John McCain
09/09/2008
L'éditorial de Pierre Rousselin du 9 septembre.
L'après-convention est une étape importante
dans la campagne pour l'élection présidentielle du 4 novembre. C'est le moment où l'on fait le bilan des investitures des deux candidats et de leurs colistiers avant la dernière ligne droite qui mène au scrutin. Dans moins
de soixante jours, les dés seront jetés.
Sur la ligne de départ, l'équipe John McCain- Sarah Palin se présente
avec une légère avance sur le tandem Barack
Obama-Joe Biden. Les sondages confirment
que les républicains ont réussi leur
pari en volant la vedette aux démocrates.
Le choix
de Sarah Palin pour la vice-présidence y est pour beaucoup. La jeune femme de 44 ans, mère de cinq enfants,
a su se présenter comme l'incarnation d'une Amérique proche des gens, tout en rassemblant
la frange conservatrice du Parti républicain.
Elle a surtout
insufflé une jeunesse et une
énergie nouvelle à la candidature du septuagénaire John McCain.
Le déluge
de révélations, destinées à
faire du tort à l'inconnue soudain
encensée, a, en fait, servi
le ticket républicain, en mobilisant
ses partisans persuadés d'être, une fois de plus, pris en grippe par une presse de gauche. C'est à se demander, d'ailleurs, si la séquence des critiques n'était pas délibérément orchestrée par les stratèges républicains.
Bref, l'« opération Sarah Palin
» se solde, à ce
stade, par un franc succès
pour John McCain. Elle a permis, par ricochet, de brouiller un peu
plus l'image de Barack Obama. Le choix
de Joe Biden, sénateur vétéran,
pétri d'expérience, apparaît bien conservateur
de la part d'un homme qui se présente
comme le champion d'une politique radicalement nouvelle.
En donnant
de la chair à la candidature de McCain, Sarah Palin souligne
aussi la distance qui demeure
entre les électeurs et
Obama, ce métis né à Hawaï d'un père kényan et qui a grandi en Indonésie.
Enfin, les républicains réussissent le plus important : faisant
campagne comme si George W. Bush n'avait jamais existé, ils se saisissent à leur tour du thème du changement, que Barack Obama avait confisqué à son profit et sur lequel le démocrate
avait, avec brio, basé toute sa campagne.
On ne sait
si John McCain s'inspire de
Nicolas Sarkozy, mais le voici
qui, pour asseoir sa volonté de « rupture », prône l'«
ouverture » en se préparant
à recruter dans sa future Administration des personnalités
démocrates. On attend de Barack Obama pareil engagement…
Maintenant que les deux
candidats se présentent en
agents du changement, la campagne
se profile comme une lutte acharnée pour convaincre les électeurs hésitants de la capacité de chacun à casser la routine de
Washington. C'est un débat familier aux États-Unis, qui avait porté, tour à tour, Jimmy Carter, Ronald Reagan et George
W. Bush à la présidence. La différence
est que,
cette fois, les deux candidats sont aussi novateurs
l'un que l'autre. C'est pourquoi l'issue
de la course reste si incertaine.