L'économie, l'Irak, le Congrès, trois atouts de McCain
09/09/2008
Chargé de cours
dans le cadre du master de sciences politiques de l'université de
Marne-la-Vallée, auteur de «Cet État qui tue la France» (Plon, 2005) et de
«L'Absolutisme efficace» (Plon, 2008), Nicolas Lecaussin analyse ce qu'il
estime être les points
forts de la candidature McCain.
C'est devenu un
rituel. À chaque élection américaine, les analystes et une
grande partie des médias se précipitent pour nous rappeler que la mauvaise situation de l'économie jouera un rôle fondamental dans le choix des électeurs. La fameuse phrase de Bill Clinton devenue
un slogan «It's the economy, stupid !», semble pourtant avoir plus d'effet sur ces Cassandre
que sur les électeurs américains. Car ceux-ci ont préféré
choisir un républicain en
2000, malgré la très belle période économique des années Clinton et, en 2004, ont décidé de réélire triomphalement le président sortant en dépit de la «situation
catastrophique» dans laquelle se serait trouvée une Amérique
en crise économique et empêtrée en Irak.
À l'origine de cette inadéquation se trouve une profonde méconnaissance
des faits.
Prenons donc cette économie américaine, objet de raillerie
pour la gauche française qui lui
prédit, depuis plus de vingt-cinq ans, une faillite imminente.
Les derniers chiffres montrent que la croissance du deuxième trimestre a été de 3,3 % et, d'après l'OCDE, sur l'année,
elle pourrait dépasser les 2 % et serait la
plus forte de tous les pays membres
du G7. Nous sommes donc
loin de la récession tant annoncée et aussi
très loin de la grave crise
que les démocrates invoquent pour justifier le changement
politique et économique.
Entre 2001 et 2008, l'économie américaine a connu, malgré les attentats du 11 Septembre, une croissance moyenne annuelle de 2,2 %. Sous le président
Bush, l'économie a connu une expansion d'environ 19 % (à titre de comparaison, celle de la France n'a augmenté que
de 14 % sur la même période).
Entre 2001 et 2007, le chômage aux États-Unis s'est situé, en moyenne, à 4,7 % (un taux auquel nos
politiques n'osent même pas rêver). Aujourd'hui, il est de 5,7 % de la population
active (il était de 5,4 % lors de la réélection de Clinton
en 1996). En 2007, plus de 3 millions d'emplois
ont été créés.
Dans la zone euro, le taux
de chômage a été de 8,3 % en moyenne pendant les mêmes années.
Plus intéressant
encore, d'après l'étude annuelle du Census Bureau (l'organisme
statistique officiel américain) qui vient d'être rendue publique, le revenu médian a connu en 2007 une troisième hausse consécutive dépassant les 50 000
dollars/an. Et toujours d'après
la même étude, les inégalités baissent : le
«quintile» composé des plus hauts
revenus a baissé de 0,8 % tandis que le troisième
et le quatrième «quintile» ont
augmenté de 0,3 et, respectivement,
0,4 %.
Il est
vrai que le déficit budgétaire s'est creusé : de 1,2 % du PIB en 2007, il passera à 2,9 % en 2008. Mais n'est-il pas toujours inférieur au taux autorisé par les traités européens ? La hausse est
due aux dépenses militaires
et aux baisses d'impôts de ce printemps : plus de 150 milliards de dollars qui ont
provoqué mécaniquement un déficit budgétaire. Celui-ci sera néanmoins compensé par une plus forte croissance économique (c'est d'ailleurs le cas au deuxième
trimestre).
Il est
vrai que l'inflation est de 5,6 % sur les derniers mois, mais la situation économique plutôt bonne dans un contexte
défavorable marqué par la crise du crédit immobilier, la faillite de plusieurs banques et organismes financiers se fait sentir
aussi dans les sondages sur le bien-être des Américains : une étude de la Gallup
Organization du 30 août dernier montre
que seulement 9 % des Américains se déclarent mécontents de leur emploi et affirment avoir peur de le perdre dans les mois qui viennent. Dans un autre sondage
du Harris Interactive pas moins de 94 % des Américains sont satisfaits de la vie qu'ils mènent. Et selon
les spécialistes des instituts
de sondage, la baisse du
prix du pétrole devrait renforcer cette vague d'optimisme. Le deuxième atout de John McCain est
l'Irak. Ardent partisan de l'intervention
américaine en 2003, il fait partie aussi de ceux qui ont le plus soutenu le renforcement des troupes sur
place et n'a cessé d'affirmer que les soldats devraient rester jusqu'à la victoire finale. Or la situation sur
le terrain a nettement changé
ces derniers mois et il
y a de très fortes chances de voir
l'Amérique gagner la
guerre.
N'en déplaise aux opposants de cette guerre, les faits sont têtus
et les statistiques sans appel
: depuis juin 2007, les attaques terroristes ont baissé de 60 %, les pertes dans les rangs des civils irakiens sont en baisse de 70 % depuis juillet 2007 ainsi que les pertes militaires américaines (moins 72 % sur la même période). Les violences interethniques ont connu une
chute de 90 % en une année
et les attaques quotidiennes
contre les forces de la coalition ont
été divisées par quatre à tel point que le général Petraeus, le
commandant des forces de la coalition en Irak (jusqu'à la fin août), vient de déclarer que les soldats américains pourraient quitter
Bagdad dans quelques mois.
L'économie n'est pas en reste. Plus de
30 000 entreprises étrangères
ont investi en Irak ces trois
dernières années, l'inflation est tombée de 65 % en 2007 à moins de
5 % en juillet 2008 et le budget de l'État a doublé en trois ans atteignant
41 milliards de dollars grâce au pétrole
dont la production a dépassé
celle d'avant-guerre. Les Chinois ont bien
compris ces changements :
ils viennent d'annoncer un investissement de 3
milliards de dollars en Irak.
Une dernière bonne nouvelle en provenance d'Irak
est le transfert
par les Américains de la région
d'al-Anbar aux mains des autorités
locales. Cette région, tristement connue pour les batailles de la ville de Faloudja, est
devenue l'une des plus calmes et des plus sûres du pays.
Les attaques ont
baissé de 90 % en douze mois. D'ailleurs, d'après le rapport réalisé en juillet par le Jane's Information Group, l'Irak est «seulement»
à la 22e place des pays à risque dans
un classement où il est largement
«battu» par d'autres États comme la Somalie, le Burundi ou le
Nigeria.
Enfin, à force de parler de l'impopularité du président Bush,
on oublie celle
du Congrès. Depuis novembre 2006 lorsqu'il
a basculé de justesse dans le camp démocrate, le Congrès n'a cessé
d'être rejeté par les Américains.
Incapable de proposer la moindre réforme
intéressante, le Congrès ne
jouit d'une cote de popularité que de 14 %, tandis que celle de Bush atteint quand même les 34 %. McCain aurait tort de ne pas en profiter.
John McCain, auquel le président Bush vient d'apporter un soutien appuyé
et cela malgré leurs divergences dans le passé,
dispose de ces atouts. Toutefois, si le candidat républicain a toujours soutenu Bush dans le dossier irakien, pour ce qui est
de l'économie, il s'est opposé aux baisses d'impôts adoptées par celui-ci. Il est revenu
dessus pendant sa campagne et en a même proposé d'autres s'il était élu.
Il a compris qu'on ne changeait pas une recette qui marche.