21/04/2008
Hillary Clinton joue son va-tout dans les élections primaires de Pennsylvanie. Dans cet
État où elle est favorite, il ne lui
suffit pas de gagner, elle doit emporter
une victoire suffisamment éclatante pour renverser le cours des choses et se présenter comme celle sans laquelle les démocrates ne pourront l'emporter
en novembre contre John
McCain.
Ce ne sera
pas facile. L'avance
dont disposait l'ancienne First Lady dans cet État
de tradition ouvrière, dont
la composition sociologique semble
être taillée à sa mesure,
s'est considérablement réduite dernièrement.
Barack Obama a beau faire des faux pas,
Hillary Clinton a le don de surréagir,
ce qui lui fait perdre l'avantage un moment obtenu. Ce fut
le cas lors
de l'entrée en scène du pasteur aux propos parfois racistes et souvent démagogiques qui fut un temps le conseiller spirituel de son
rival. Barack Obama réussit à
se sortir de l'ornière en prononçant un discours
fort remarqué sur la
question raciale.
Lorsque, plus récemment, le candidat noir se mit à parler de l'«amertume» des laissés-pour-compte
de Pennsylvanie qui «se raccrochent
à leur foi,
à leurs armes
à feu et à leurs préjugés
anti-immigrés», Hillary Clinton fit beaucoup de bruit
pour dénoncer un tel mépris des petites gens. Il y avait en effet,
dans cette phrase, un indice qui peut laisser penser que, malgré sa
magie, Barack Obama ne serait qu'un politicien
comme un autre.
Mais il
n'est pas certain que l'attaque ait porté.
À la spontanéité, certes maladroite,
du sénateur de l'Illinois répondait une Hillary Clinton toujours aussi calculatrice et dont l'attitude
à l'égard de Dieu, du port d'armes
ou de l'immigration n'est pas exempte d'arrière-pensées électorales.
Si Barack Obama reste, à ce stade de la course, l'homme à battre, c'est
parce qu'il a réussi à échapper
à toutes les étiquettes que Hillary Clinton a essayé de lui coller.
Il n'est pas le candidat de la minorité noire, ni celui des syndicats
ou de la frange la plus à gauche du parti
démocrate. Pour les démocrates,
Obama est insaisissable, inclassable. Il le sera beaucoup moins s'il se retrouve face à John McCain, qui pourra sans
mal le dépeindre comme un démocrate dispendieux et trop tendre en matière de sécurité nationale.
Depuis longtemps déjà, Hillary
Clinton joue le deuxième
tour de ces élections pour tenter de s'imposer au premier.
Elle fait valoir qu'elle a
plus de chances de l'emporter en novembre
que Barack Obama.
C'est un argument qui n'a pas encore convaincu les démocrates.
Si elle gagne
aujourd'hui en Pennsylvanie,
elle pourra dire qu'elle l'a emporté
dans tous les grands États où
les démocrates doivent être forts lors de la présidentielle cet
automne. Mais pour que cet
argument suffise à faire basculer dans son camp les superdélégués qui détiennent la clé de l'investiture, la victoire devra être présentée comme un triomphe marquant un virage dans la campagne.
Autrement, il
ne lui restera
qu'à se démettre si elle ne
veut pas, par des calculs inconsidérés, prolonger un duel
fratricide qui ne peut que compromettre les chances des démocrates de revenir à la Maison-Blanche.