JO : la polémique commence
L'éditorial de Pierre Rousselin du 15 février
15/02/2008
Les Jeux
olympiques sont la grande fête mondiale du sport, l'une des activités humaines qui peut le mieux rapprocher
les races et les continents.
Cet été, l'événement se déroule à Pékin
et marque le retour de la
Chine parmi les grandes puissances mondiales. Boycotter
le rendez-vous reviendrait à rejeter un
quart de l'humanité. Il ne peut en être
question.
Les JO sont
toujours pour le pays organisateur
la promesse d'une visibilité internationale
sans équivalent. La couverture
médiatique est
devenue telle que les épreuves sportives ne sont
qu'un prétexte à un coup de projecteur général. La situation interne du
pays hôte, celle
des droits de l'homme notamment, et sa politique étrangère ne peuvent y échapper.
En Chine moins que
nulle part ailleurs.
Le régime chinois
le savait lorsqu'il a demandé à organiser
une célébration qui est pour lui
l'occasion de faire étalage
de sa réussite. Imperméable à toute
idée de démocratie, il ne trouve
sa légitimité que dans le taux
de croissance faramineux de
son économie et dans la convoitise que cette performance suscite. Quoi
de plus mobilisateur pour les masses
chinoises que le
spectacle du monde entier rassemblé à Pékin
dans des installations dernier cri ?
Mais pour le Parti communiste chinois, cette grande fête a un prix. Le Tibet, Taïwan, la peine de mort, le sort réservé
aux dissidents ou à la secte Falungong et, enfin, le rôle de Pékin au Darfour sont autant de dossiers qui mobilisent tous les défenseurs des droits de l'homme de la planète. Les Jeux olympiques
leur offrent, à eux aussi,
une visibilité sans équivalent. Ils
vont évidemment en profiter.
La Chine s'est
préparée à cela. Elle muselle ses opposants
maintenant, pour ne pas avoir à le faire dans six mois. Sa
diplomatie se montre plus accommodante. Au Darfour, elle pensait avoir
écarté les critiques en approuvant
le déploiement de Casques
bleus. Mais elle n'a rien fait pour peser sur le régime soudanais, qui ne survit que par le pétrole qu'elle lui achète.
Le coup de sang de Steven
Spielberg n'est pas déterminant
en lui-même. Mais il est révélateur par ce qu'il annonce. Spielberg,
c'est Hollywood. Et Hollywood, c'est l'establishment du Parti démocrate.
Lequel est
en pleine campagne en vue de la présidentielle de novembre aux États-Unis.
Les Chinois n'ont pas de chance avec
le calendrier. Leurs Jeux olympiques s'ouvriront le 8 août, peu avant
les conventions aux États-Unis, lorsque
la température politique
sera très élevée outre-Atlantique. Tout porte à croire
que des dossiers comme le Darfour, les droits de l'homme et la politique à l'égard de la Chine seront au cœur de la bataille entre démocrates et républicains.
Pour nous
aussi, le calendrier est délicat.
Il se trouve que la France représentera l'Europe au moment des Jeux. En
Grande-Bretagne, en Allemagne et
dans les pays nordiques, le
débat sur la Chine et les droits de l'homme est déjà en train de monter. Le jour venu, Nicolas Sarkozy sera à la manœuvre.