Le cadeau Bush

L’évènement à la mi-février est indubitablement la visite au Bénin du président américain George W Bush. Le chef de la super puissance mondiale devrait fouler demain samedi le sol national. Ainsi, dans la veine de l’inédit, le patron de la maison blanche viendra partager avec nous les vertus américaines. God Bless America. Que la bénédiction divine dont jouissent les héritiers de George Washington et de Thomas Jefferson descende sur la nation qui chante l’Aube Nouvelle.

Selon le communiqué du ministère des affaires étrangères, "cette visite s’inscrit dans le cadre d’une tournée africaine qui conduira le président américain au Bénin, en Tanzanie, au Rwanda, au Ghana et au Liberia". L’histoire nous enseigne que la dernière tournée africaine de George W. Bush remonte à juillet 2003. Et il s’était alors rendu au Sénégal, en Afrique du sud, au Botswana, en Ouganda et au Nigeria. C’est sans doute un privilège et un honneur d’accueillir un président américain. Jamais depuis l’indépendance en 1960, aucun chef de l’Exécutif américain en exercice n’est descendu à l’aéroport de Cotonou. De John Kennedy (au pouvoir en 1960) à Clinton en passant par Lyndon Johnson, Nixon, Ford, Carter, Reagan et Bush père. Le palmarès du Bénin est vierge et famélique. L’arrivée de Bush Junior a donc rendez-vous avec l’histoire. Même si la visite du chef de la maison blanche ne se réduira qu’à une escale de 3 heures environ à l’aéroport de Cotonou, il respirera l’air frais du changement. Sur la voie de l’émergence, le Bénin se laissera volontiers à une contagion économique. Boni Yayi devrait s’abreuver des conseils de l’homme le plus puissant du monde. Le président peut se targuer d’avoir éliminé le poids cruel de l’histoire en attirant le chef de la première armée de la planète au Bénin. Bush Junior ne pouvait résister aux efforts de consolidation de la démocratie et du développement économique et social dans notre pays. Cette visite, victoire diplomatique de l’équipage Yayi, apparaît comme une prime à la démocratie et un baromètre pour le régime du changement. Ce succès personnel de Boni Yayi éclipse à l’excès la rébellion sociale et soigne un système en butte à une fronde massive.

La diplomatie transformatrice inventée par Bush pour encourager la démocratie s’était déjà illustrée par la création en 2004 du compte du millénaire géré par la société du millénaire un organisme fédéral. Sous le régime Kérékou, le Bénin avait déjà signé l’accord du Millenium challenge account (Mca). Des méthodes novatrices pour l’octroi de l’aide américaine font du Bénin un partenaire privilégié des Etats-Unis en raison de la lutte pour la bonne gouvernance développée sous Boni Yayi. La croisade contre la corruption est de nature à rassurer les américains et encourager les investisseurs. Le passage de Bush sur le sol Béninois va à coup sûr servir de levier à un rayonnement de la coopération bilatérale entre Washington et Cotonou.

Mais il n’est pas exclu que le chef de la superpuissance militaire aborde avec Boni Yayi le sujet d’Africom, le centre de commandement militaire américain proposé pour le continent africain. Le United States Africa Command montre l’importance croissante de l’Afrique dans la géopolitique des Etats-Unis. Le périple au Bénin, en Tanzanie, au Rwanda, au Ghana et au Liberia pourrait être mué en une opportunité rêvée pour Bush, d’étaler Africom dans les échanges. Depuis Truman, l’Amérique a d’emblée affiché sa vocation de diriger le Monde libre et sauvegardé "les valeurs de la démocratie et de la liberté"

Cette visite du locataire du bureau ovale, au Bénin, peut contribuer à vendre l’image du pays. Les 1000 milliards arrachés au mécanisme africain pour l’évaluation par les paires n’étaient donc pas volés. La démocratie va continuer à libérer ses dividendes. Bush ouvre certainement le ballet des hommes les puissants du monde à Cotonou.

Sulpice O. Gbaguidi, 15 février 2008