La désagrégation de Barack Obama
Mis en ligne le
29.01.2014 à 20:45
Charles
Poncet
Beau
morceau d’éloquence – l’homme est un orateur de talent – le discours sur l’état de l’Union
de Barak Obama est aussi l’occasion de constater à quel point sa présidence
est un échec.
En
novembre 2008, lorsqu’il devint le 44ième président des Etats Unis, on crut qu’il marcherait
sur l’eau et multiplierait les pains à la manière
de celui qu’évoquait immédiatement la dévotion qui l’entoura instantanément, jusqu’à un prix Nobel de la paix immédiat, dont on se demande à quel titre il le méritait,
sauf à reconnaître qu’il l’obtint pour ne pas être Georges Bush, distinction tout de même
un peu courte.
Voir la grande démocratie américaine, si mal en point depuis les attentats du 11 novembre 2000, élire à sa tête
le représentant d’une minorité ethnique, était en soi la promesse de lendemains radieux. Obama passait pour libéral : la torture, Guantanamo, l’obsession
sécuritaire, les méthodes honteuses à la Dick Cheney, tout cela
ne serait bientôt plus qu’un triste souvenir.
Quelle déception attendait les espoirs libéraux ! Guantanamo n’a pas été fermée. Il paraît, Obama l’a dit dans son discours
en passant, que ce pourrait être cette
année. Pour une promesse faite il y a cinq ans,
ce n’est guère brillant. L’Amérique du 5ième amendement, celle de Miranda v. Arizona (« vous
avez le droit de garder le silence, rien de ce que vous
direz ne peut être retenu contre
vous etc »), continue de martyriser
des détenus qui ne savent
pas pourquoi on les emprisonne
et n’ont aucun droit d’habeas corpus ou autre. Une
honte absolue.
La
torture – pardon, l’interrogatoire renforcé – a paraît-il été interdite, mais qui sait combien
de water boardings se pratiquent
encore ? Et qui empêche les sbires
de Guantanamo de « prêter » discrètement
un détenu à un gouvernement
« ami », le temps que le
type soit torturé par des spécialistes et fasse des
confessions ? Une honte totale.
Le
prix Nobel de la paix autorise
des assassinats en série
par la méthode la plus vile qui soit
: les drones, ces engins de
mort qui épient les terroristes
vrais ou supposés jusqu’au moment où un pilote calfeutré
dans un fauteuil au Texas et sirotant
un Coca Cola appuie sur le bouton qui envoie le missile exploser au milieu d’un groupe d’innocents, non sans ajouter au
passage un cynique « good bye motherfuckers ». Une honte indicible.
Parti au Moyen
Orient pour débiter de belles paroles en pensant qu’il allait
charmer ses interlocuteurs comme de simples électeurs de l’Oklahoma, Obama est allé d’échec en échec : il n’a
rien compris aux révoltes arabes et il a laissé les factions libyennes massacrer ses diplomates. Une honte monumentale.
La
collecte de la donnée par
milliards continue de plus belle. On écoute les téléphones des chefs d’état « alliés
», le délire sécuritaire est digne de la pire époque de Bush et en réponse
quand les américains s’indignent, le président n’offre que sa
recette habituelle : du baratin.
Sur
le plan intérieur, il s’est avéré incapable de travailler avec un parlement qu’il n’aime pas et qui le lui rend bien. A la différence de Lincoln, cajolant ses adversaires, marchandant et manœuvrant pour
faire passer l’abolition de l’esclavage,
la stratégie d’Obama fasse au Congrès s’est avérée, là
aussi, inexistante : de
beaux discours, du vent, de la fumée
et rien d’autre. On en voit aujourd’hui les résultats :la loi sur l‘assurance maladie, mal négociée – et pas
par lui d’ailleurs, il n’a pas voulu
mettre les mains dans le cambouis – va de raté en raté. La réforme de l’immigration est au point mort et malgré des
massacres à la chaîne dans
les écoles et les cinémas,
le président a été
incapable de faire voter une loi
modérément contraignante sur les armes à feu.
Le
voici réduit à vociférer sur la classe moyenne, comme il l’a
fait l’autre jour :
il s’engage à la « défendre », l’œil sur les élections de cet automne, perdant
de vue que personne ne donne plus le moindre crédit à ce qu’il raconte.
Ses supporters les plus dévoués
même, se détournent, font défection par dizaines de milliers et rallient le clan d’Hillary Clinton. C’est elle qui porte les espoirs de 2016.
Barack
Obama aura été le président
des espoirs déçus.